Personnages du Coran et de la Bible

Élie et Élisée (deuxième partie)

En introduisant les prophètes que les musulmans appellent communément Ilyas et Al-Yasa, c’est-à-dire Élie et Élisée, nous avons pris le temps d’expliquer quelque chose au sujet de la situation religieuse du peuple parmi lequel ils prêchaient. En effet, juste après le règne de Salomon, le royaume d’Israël fut divisé en deux, et Jéroboam, le premier roi sur les tribus du nord, fit tout son possible pour décourager son peuple de retourner à Jérusalem pour adorer l’Éternel. Il dressa des idoles aux deux extrémités de son territoire et dit à ses sujets de s’y rendre pour faire leurs sacrifices. La mission que Dieu confia à Élie et Élisée concernait les habitants de cette région où l’on proposait à la population une contrefaçon de la vraie religion.

Un point de crise

Environ soixante ans après la division du royaume, sous un roi du nom d’Achab, la condition spirituelle en Israël du Nord s’était aggravée. En plus de la version faussée de la religion juive, défigurée par le culte des veaux d’or, Achab avait introduit dans son royaume la religion païenne de sa femme Jézabel, le culte de Baal. Ce Baal était un dieu de fertilité, censé donner à ses adorateurs les bonnes récoltes, la multiplication de leur bétail, les enfants et tout ce qui concernait la prospérité et la reproduction. On l’adorait souvent en commettant des actes sexuels avec ses prêtres. Jézabel payait les salaires de 450 prophètes de Baal. En plus, elle essayait de supprimer ce qui restait du culte de l’Éternel en mettant à mort les prophètes du vrai Dieu d’Israël. Voilà donc la triste situation lorsque le prophète Élie entre sur la scène dans le livre biblique de 1 Rois, chapitre 17 :

« Élie, un homme du village de Tichebé, en Galaad, dit au roi Achab : “Par le Seigneur vivant, le Dieu d’Israël dont je suis le serviteur, voici ce que je te déclare : ‘Il n’y aura pas ces prochaines années ni rosée ni pluie, sauf si je le demande.’” »

Quand on sait que les Israélites adoraient un faux dieu dont les prophètes vantaient le pouvoir de donner la pluie et la fertilité, on voit que cette parole du prophète Élie n’était pas de la méchanceté ; c’était plutôt un acte nécessaire pour montrer l’impuissance de Baal et la folie de se confier aux idoles.

Le récit de la Bible continue ainsi :

« Après un temps assez long, durant la troisième année de la sécheresse, le Seigneur adressa la parole à Élie : “Va te présenter devant le roi Achab, lui dit-il, car je vais faire tomber la pluie sur le sol desséché.” » (2 Rois 18.1)

La confrontation qui suivit entre Élie et les adorateurs de Baal est évoquée dans quelques versets de la 37ième Sourate du Coran, mais nous allons nous baser sur la version plus détaillée de la Bible, en 2 Rois 18.

« Achab vint à la rencontre d’Élie, et dès qu’il le vit, il lui dit : “Te voilà, toi qui amènes le malheur sur le peuple d’Israël !” Élie répondit : “Ce n’est pas moi qui ai amené le malheur sur Israël ; c’est toi et ta famille, parce que vous avez refusé d’obéir aux commandements du Seigneur et que vous avez adoré les dieux Baals. Mais maintenant, envoie des messagers. Qu’ils rassemblent tout le peuple d’Israël autour de moi, sur le mont Carmel, avec les quatre cent cinquante prophètes du dieu Baal et les quatre cents prophètes de la déesse Achéra, qui sont les protégés de la reine Jézabel.”

… Quand ils furent rassemblés, Élie s’avança devant tout le peuple et dit : “Quand cesserez-vous de pencher tantôt d’un côté, tantôt de l’autre ? Ou bien c’est le Seigneur qui est le vrai Dieu, et alors rendez un culte au Seigneur ! Ou bien c’est Baal qui est le vrai Dieu, et alors rendez un culte à Baal !” Mais personne dans le peuple ne répondit.

Élie reprit : “Moi je reste seul comme prophète du Seigneur, tandis que les prophètes de Baal sont au nombre de quatre cent cinquante. Qu’on nous donne deux taureaux : les prophètes de Baal en choisiront un, qu’ils découperont et placeront sur du bois pour l’offrir en sacrifice, mais sans allumer le feu. Je préparerai l’autre et je le placerai sur du bois, mais je n’allumerai pas non plus le feu. Ils prieront leur dieu, et moi je prierai le Seigneur. Le vrai Dieu sera celui qui répondra aux prières en allumant le feu.” Tout le peuple répondit : “Nous sommes d’accord.” Alors Élie dit aux prophètes de Baal : “Choisissez l’un des taureaux et préparez-le, vous les premiers, puisque vous êtes les plus nombreux ; ensuite priez votre dieu, mais n’allumez pas le feu.”

Ils prirent le taureau qu’on leur présenta, ils préparèrent le sacrifice, puis ils supplièrent Baal depuis le matin jusqu’à midi : “Baal, réponds-nous !” disaient-ils, et ils dansaient autour de l’autel qu’ils avaient construit ; mais ils ne reçurent pas un mot de réponse. Vers midi Élie se mit à se moquer d’eux, en disant : “Criez plus fort ! Puisqu’il est un dieu, il est très occupé ; ou bien il a une obligation urgente, ou encore il est en voyage ; peut-être qu’il dort, et il faut le réveiller.” Ils crièrent plus fort ; selon leur coutume ils se blessèrent volontairement avec des épées et des lances jusqu’à ce que le sang coule sur leur corps. Quand midi fut passé, ils appelèrent Baal avec encore plus d’excitation jusqu’à l’heure où l’on présente le sacrifice de l’après-midi, mais ils ne reçurent aucune réponse : ni un mot ni un signe.

Alors Élie invita tout le peuple à s’approcher de lui ; quand ils se furent approchés, Élie se mit à réparer l’autel du Seigneur, qui était en ruine. Il prit douze pierres, nombre correspondant aux douze tribus des descendants de Jacob… Avec ces pierres, il reconstruisit donc l’autel consacré au Seigneur. Il creusa tout autour de l’autel un fossé pouvant contenir une trentaine de litres ; il arrangea des bûches de bois sur l’autel, puis découpa le taureau et plaça les morceaux sur le bois. Il ordonna ensuite à ceux qui étaient là : “Remplissez quatre cruches d’eau et versez-les sur le sacrifice et sur le bois.” Ils le firent. “Faites-le une deuxième fois.” Ils le firent. “Faites-le une troisième fois,” ajouta-t-il. Et ils le firent. L’eau coula tout autour de l’autel et remplit même le fossé.

À l’heure où l’on présente à Dieu le sacrifice de l’après-midi, le prophète Élie s’approcha de l’autel et dit : “Seigneur, Dieu d’Abraham, d’Isaac et Jacob, montre aujourd’hui que tu es le Dieu d’Israël, que je suis ton serviteur, et que c’est sur ton ordre que j’ai fait tout cela. Réponds-moi, Seigneur, réponds-moi afin que ces gens sachent que c’est toi, Seigneur, qui es le vrai Dieu, et tu les ramèneras ainsi à leur fidélité d’autrefois.” Le Seigneur fit alors descendre du feu qui brûla le sacrifice, le bois, les pierres et la poussière, et qui fit évaporer l’eau du fossé. Lorsque les Israélites virent cela, ils s’inclinèrent tous jusqu’à terre, puis ils se mirent à crier : “C’est le Seigneur qui est le vrai Dieu ! C’est le Seigneur qui est le vrai Dieu !” » (1 Rois 18.17-39)

Sur la parole du prophète, le ciel sans nuage depuis si longtemps s’assombrit et une forte pluie se mit à tomber. Le peuple ayant reconnu, en effet, que c’est l’Éternel et non pas Baal qui donne ou qui retient la pluie et toute bonne chose, Dieu était prêt à accorder sa bénédiction.

Élie passe le bâton à Élisée

Cette bataille remportée par le prophète n’était pas la fin de la guerre contre le culte de Baal et d’autres idoles en Israël. En effet, la reine Jézabel ne se repentit pas du tout. Au contraire, elle a voulu faire mourir Élie pour avoir été responsable de la mort des prophètes de son faux dieu, et Élie fut contraint de fuir pour se sauver la vie. Il se réfugia dans une caverne dans le désert et dit à Dieu : « Seigneur, Dieu de l’univers, je t’aime tellement que je ne peux plus supporter de voir comment les Israélites agissent. En effet, ils ont rompu ton alliance, ils ont démoli tes autels, ils ont tué tes prophètes ; je suis resté moi seul et ils cherchent à me tuer » (1 Rois 19.14). Mais Dieu lui dit de se remettre au travail. Il devait oindre un roi sur Syrie, et un autre qui remplacerait Achab et sa famille ; il devait aussi oindre Élisée pour le succéder comme prophète. En plus, Dieu l’informa qu’il y avait encore 7 000 Israélites qui, dans la fidélité envers l’Éternel, n’avaient jamais fléchi les genoux devant une statue de Baal. Avec Élisée à ses côtés, Élie a repris la lutte contre l’idolâtrie de son peuple. Après que Dieu a appelé Élie auprès de lui, Élisée a continué de confronter les rois d’Israël et les rappeler à la fidélité au seul et véritable Dieu.

← L’article précédent
Élie et Élisée (première partie)
L’article suivant →
Jonas